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Randonnée au Kenya
juillet-août 2009


Henri Maître

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Le Kenya [prononcez Keny-a] est un pays d'Afrique de l'Est, à mi-chemin de la Casamance et du Lesotho, mais plus à l'Est. En forme de diamant, un peu abîmé lors de sa taille, le Kenya est enchâssé entre le lac Victoria et l'Océan Indien. La violente plaie du Grand Rift le traverse de part en part, du Nord au Sud et de juin à février. Pendant la saison des pluies (masika), la vallée du Rift est remplie d'eau (assertion non vérifiée par l'auteur). Le Kenya est bordé par l'Ethiopie, le Soudan, l'Ouganda, la Tanzanie et la Somalie, pays avec lesquels il partage des frontières géométriques, poreuses et parfois conflictuelles. Par sa frontière océane, il est aussi voisin des Kouriles et des Galapagos, mais ne tire qu'un avantage dérisoire de ces voisinages.

Le Kenya fut découvert par le très jeune KNM-WT 15000 (-1 873 692, -1873 677 AC), qui arriva jusqu'au bord du lac Turkana, tandis que Lucy (-2 275 753, -2 275 731 AC), plus connue, n'a pu dépasser les frontières de l'Ethiopie. Les Allemands prétendirent longtemps que ce furent à J. Krapf (1810-1881) et J. Rebmann (1820-1876) que l'on dut ces découvertes, tandis que les Anglais tenaient R. Burton (1821-1890) et JH. Speke (1827-1864) pour les inventeurs. Burton aurait parcouru le pays sur un char romain comme le rapporte une iconographie persistante. Il faut réaffirmer ici que, contrairement à ce que pensent certains Belges, Tintin (7-77) n'a jamais découvert le Kenya.

Le Kenya exporte aussi du thé, du café et du cacao, essentiellement vers l'Angleterre, tandis qu'il importe de ce pays des flocons d'avoine pour son porridge matinal. D'aucuns pensent que cela explique que beaucoup d'Anglais ne souhaitaient pas quitter le Kenya, tandis que de nombreux Kenyans rêvent aujourd'hui de s'installer sur les bords de la Tamise. Il importe également beaucoup de touristes, mais, probablement parcequ'ils se tiennent mal, il en consomme peu et les rend à leurs origines, à l'inverse des Toyota qu'il consomme jusqu'au dernier boulon (en fait seules les Peugeot ont déjà atteint ce stade ultime de leur vie, les japonaises, plus récentes, résistent encore bien).

Le Kenya est vaste comme la France et la Gaspésie réunies. Il abrite 38 millions d'habitants, répartis en 3 familles ethno-linguistiques et en 70 sous groupes ethniques. On y parle plus de 60 langues (pour peu qu'on les connaisse, ce qui ne semble pas fréquent). On compte 3 religions principales, subdivisées en 62 528 obédiences et 812 160 églises dissidentes, ordinairement réparties régulièrement le long des routes où elles alternent avec les académies et les écoles confessionnelles. La guidance spirituelle et éducative est une préoccupation majeure du peuple kenyan qui y a voué une proportion forte de son potentiel humain. Le reste de la population, en habits fins, les écoute du vendredi au dimanche soir. Une des expressions les plus visibles de la sensibilité artistique kenyane se rencontre également le long des grandes routes sur les façades des petites boutiques qui arborent des couleurs violentes habilement combinées ; une autre se manifeste dans l'abondance des salons de coiffure et échoppes d'esthétique masculine et féminine. Leurs tarifs sont extrêmement abordables.

Enfin, rappelons nous que le Kenya est la nation la plus rapide sur 10 000m, quoiqu'en disent certains Ethiopiens.

Partis de Nairobi contourné par le sud-ouest en direction de la faille du Rift, abandonnée puis retrouvée la grande A104 pour des petites routes de travers. Les lacs Naivasha et Nakuru, incontournables, puis la B5 vers Nyahururu a travers les théiers et les caféiers, et les grandes étendues des fermes du Laikipia et des hauts plateaux du Loldaika. Savane sèche à 2000 m du pays Samburu, parcourue de grands troupeaux. Pas beaucoup d'eau, pas beaucoup d'herbe pour beaucoup de têtes : antilopes et gazelles, éléphants, girafes lointaines sur des crêtes, traces de félins, de hyènes, invisibles, épines partout, poussière rouge que soulèvent de grands masaïs, oiseaux vétus de bleu éclatant, de noir rayé de blanc, de pourpre. Et des épines encore sur chaque bois, sous chaque feuille. Et des épines partout, l'ai-je dit ?

Départ pour reprendre la A2. On recoupe l'Equateur avec lequel on tricote depuis huit jours. C'est la Tran-East African Highway. On évitera Isiolo, on plonge au Sud vers Chogoria. On débarque dans les bambuseraies, avec l'objectif au soleil couchant. Longue montée dans des décors de western, jusqu'au Lac Michelson atteint à la nuit. Et on remonte dans la pierre dure coupée de lobélies et de séneçons. La hutte autrichienne ne nous accueillera pas pour la nuit, les tentes sont calées par des pierres au dessus du glacier : 4790 m, la nuit sera courte car le soleil ne nous attendra pas à la pointe Lennana (4 995 m, elle aurait pu faire un effort !).

Redescente par la piste Kamweti, à travers des étages de livres de botanique : des lobélies, comme des bobbies en faction, des touffes d'herbe à éléphants, hautes comme des éléphants, des séneçons à tous les niveaux de maturité, puis des bruyères géantes à peine plus basses que des platanes centenaires, des bambuseraies tissées serrées comme des toiles d'araignée, des lichens pendants sur des arbres tordus, des orchidées, des glaïeuls, ...




Comment ne pas voler ces photos exceptionnelles de ces petits villages alignant le long de la route leurs boutiques aux couleurs pimpantes, bariolées des mauves, des verts, des jaunes les plus claquants, ces maisons de guinguois, rafistolées, hésitant entre l'effondrement et la fuite dans le premier vent de sable, bordant une ruelle que la dernière pluie a transformée en bourbier, ces marchés innombrables, aux étales voisines de légumes, de savates, de courroies de transmission, de canne à sucre, de barriques d'huile ou de tabliers d'écoliers. Toutes ces boutiques de coiffure, pour hommes, pour femmes, de manucures, d'esthéticiennes, ces laboratoires photographiques, convertis à la vidéo et aux technos de pointe. Toutes ces églises serrées les unes contre les autres dans une association des protecteurs déclarés du salut des âmes,

Des villageoises élégantes sous un parapluie, retour de confesse ou de Dieu sait quelle diablerie dans le hameau voisin, des écolières, en uniforme, en groupe, en goguette, en fête, pressées et riantes, des vieux acoudés à une pile de pneus ou quêtant l'ombre d'un rare acacia, ou poussant un âne famélique devant une charrette brinquebalante, des motards emmitouflés comme des mongols au cœur de l'hiver

Des troupeaux de chèvres perchés dans les arbres, des chiens au poil ras et poussiéreux, éclopés, errants de coup de pied en jet de pierre, des poulets au cou rouge et nu, au cul à l'air, piaillant comme des commis de bourse à la corbeille, des chats discrets, glissant de l'ombre d'un tas de bois à l'entrebaillement d'une porte en guettant leurs arrières.

La vie de tous les jours, quoi ... que n'interrompt pas une poignées de clampins ...




Les oiseaux constituent sûrement l'une des raisons de visiter le Kenya. Bien sûr il y a tous les grands voiliers, réunis par milliers sur les lacs d'eau saumâtre : les flamants, pélicans, cigognes, cormorans, ibis, hérons ... Il y a aussi les rapaces, aigles pêcheurs, aigles bateleurs, serpentaires, vautours. Il y a les coureurs des plaines, les perdrix, les pintades et la majestueuse outarde. Il y a les perroquets et perruches que l'on entend plus que l'on ne voit. Il y a les innombrables compagnons d'un instant, à peine aperçus aux cimes des arbres ou au creux des taillis, ceux qui criaillent à l'unisson au lever du jour, ceux qui s'interpellent la nuit, ceux qui accompagnent le marcheur de leur alerte tapageuse, ceux qui picorent les bœufs ; avec des noms étranges : choucador superbe, merle métallique, calao, tantale ibis, pygargue, courvite, rollier, guêpier, tisserins.

Toute ma science, bien modeste est issue du merveilleux site oiseaux.net , à sa page Kenya.

Et, en plus, les photos du calao à bec rouge, du merle métallique et de quelques flamants sont l'œuvre du zoom d'Elisabeth (ES) tandis que le pélican, les ibis noirs, le marabout et le serpentaire sont dûs à Jacques (JB). Merci à eux.




Que dire des magnifiques populations croisées pendant ce séjour ?

Leur jeunesse tout d'abord est frappante et les photos en rendent bien compte. A chaque pause, des hordes de jeunes (garçons surtout) nous entourent, se lançant vaillament dans des échanges nourris ... 98 % concernent le football bien sûr, domaine universellement partagé. Certes le Kenya ne brille pas beaucoup sur la planète footballistique, mais Zidane est la source de toutes les discussions et nous sommes spontanément baignés d'un halo de gloire dont nous ne sommes, tout autant les uns que les autres, guère coupables ! Qu'importe la discussion est partie à grand renfort d'exclamations universelles.

Dans les villages, les enfants surtout sont vêtus des tenues les plus ahurissantes : combien de passe-montagnes, combien de gros bonnets de laine enfoncés jusqu'au cou, des bottes de caoutchouc, clairement hors de taille, des doudounes de grosse laine ... certes il fait parfois frais après l'orage, mais ces tenues de norvégiens côtoient des chemisettes ou des maillots légers dont ne semblent pas souffrir leurs camarades.

Sur le plateau Masaï, ce sont les jeunes hommes surtout que nous rencontrons, figures hiératiques, parfois dans l'habit traditionnel, une tunique courte, rouge souvent, de nombreux colliers, des bracelets de perle, des ceintures larges et ornées. Le soir venu, ils jetteront sur leurs épaules une vaste cape, sortiront une pipe et se lanceront entre eux en de longues discussions.




J'avoue que je n'ai pas vu de crocodile, ni de hyène (ou à peine et dans le noir), ni de tamanoir, je n'ai pas vu de pangolin ni de guépard, je n'ai pas vu de lion (mâle)

j'avoue que je n'ai vu de si près des rhinos, des lionnes et des aigles pêcheurs qu'avec la généreuse complicité de la Kenyan Wildlife Association et de ses véhicules

j'avoue que la seule angoisse que j'ai éprouvée face à des crocs et des griffes venait d'un rottweiller vagabond et sympathique qui nous a accompagnés en pays Samburu, se chargeant de lever lièvres et marmottes (mais battant prudemment en retraite devant les phacochères ...) (non, moi n'ai pas eu peur des éléphants errants autour des tentes la nuit, car je dors comme un sonneur)

j'avoue tout cela, ... mais les autres, je les ai vus de mes deux yeux et nous avons foulé, eux et moi, la même latérite sous le même soleil de plomb. Et s'ils sont souvent petits sur mes images, c'est que je fais beaucoup de bruit en marchant et que mon 60 mm est bien léger pour ces grands espaces.

Je vous les livre ici, pieds et poings liés (ça ne se fait plus de poser un pied sur les dépouilles, mais moralement je vaux Tintin et Tartarin réunis !).

... et si je confonds encore gazelle de Grant et gazelle de Thomson, si je confonds éland du Cap et bubal, ce n'est pas la faute de Wilson, infatigable pédagogue et zoologue averti.

Merci à Jacques et Elisabeth pour leurs images de girafe, de rhinos, de chacals (de shakos ?) de lions, que leur œil attentif n'a pas ratés.




Les paysages sont souvent secs et les fleurs alors peuvent être rares, mais si l'on cherche bien, on ne manque pas d'en trouver, des petites, des maigrichonnes, des timorées, des pâlotes qui se planquent sous les herbes.

Et lorsqu'on arrivera dans les régions plus humides, leur abondance sera exceptionnelle, et non seulement leur abondance, mais aussi leur variété, leur opulence, les kniphofia éclatants, les lobélias monstrueux, les tulipiers splendides, les multiples séneçons, les euphorbes torturés, les bougainvilliers en rideau ... Et que dire de ces cascades de feuillages, de mousses, de lichens qui vous absorbent dans les forêts denses au pied du Kenya.

Je vous livre ici le résultat de plusieurs journées de confrontation de mes clichés avec les diverses encyclopédies en ligne, parmi lesquelles je saluerai particulièrement Plantnet qui m'a beaucoup guidé. Toutes les infos sont celles de ces encyclopédies et toutes les erreurs sont de moi !




 

De mémoire : un trek de quinze jours, vingt deux mille six cents kilomètres de pistes, soixante trois mille mètres de dénivelé, huit cent douze porteurs et soixante treize cuisiniers (à moins que j'exagère un peu ...)

Huit pélerins (Laurence, Elisabeth, Alexandra, Jacqueline, Jacques, Jean-Marie, Edouard et moi, et moi, et moi !) que Terdav a confiés aux bons soins d'African Latitude et à la compétente supervision de Wilson. Excellent encadrement, parfaitement organisé et particulièrement informé pour nous déniaiser sur la faune, la flore, la géologie et surtout l'environnement social et économique (Y'a du boulot !).

Huit paires de chaussures pour fouler la poussière, gravir les rochers, descendre les éboulis, zigzaguer dans les touffes de la savane, planquer sur les traces de girafes, patauger dans les fondrières des éléphants, glisser sur les planches d'un pont de fortune, marchander à l'étale d'un brocanteur, ahaner sur les pentes de la pointe Lanana, s'extasier devant le coup de hâche du Grand Rift.

Un encadrement attentif à nos faiblesses (merci pour la bienheureuse moto qui m'a opportunément extrait d'une passe un peu acrobatique). Un accompagnement dans les longues traversées de la savane ou les rudes montées au Mont Kenya, toujours souriant, toujours prévenant, réussissant avec bonheur des "spécialités locales" avec un poulet acquis dans un village, quelques légumes et du manioc. Merci à chacun d'eux.






Carte du Kenya à cheval sur l'Equateur
entre Grands Lacs et océan Indien



Détail de l'expédition
Partis de Nairobi, on y revient
dans le sens trigonométrique



 

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Page créée par H. Maître en 2009      -     revue en octobre 2015      -     recréée le 8 février 2024


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